Une des questions les plus souvent posées en formation est : « comment détecter une personne en souffrance ? ». C’est un enjeu majeur de la prévention. In fine, les risques psychosociaux se manifestent chez des personnes qui sont en souffrance sous des formes variées. Attention toutefois aux évidences cachées derrière cette question de bon sens. Attention à ne pas vouloir devenir le « Sherlock Holmes » de la détection, avec son regard laser et sa boîte à outils infaillible, dans une posture d’enquêteur soupçonneux. Attention à ne pas se sentir responsable tout seul de la bonne santé de ses collaborateurs. Attention à ne pas devenir anxieux, vivant dans la peur « de ne pas avoir vu ». Le manager ne peut pas être responsable de tout et il est nécessaire de rester vigilant à la tentation d’en faire un « être tout puissant » qu’on équipe à coup de formations techniques sur tous les sujets.
La prévention est une affaire collective. Elle est efficace si chacun est en attention à l’autre, au travail, s’il y a la confiance pour oser faire part de ses difficultés ou de ses désaccords au travail. Créer un climat de confiance où la parole sur le travail et sur son état au travail est autorisée et prise en compte est sûrement plus efficace que la seule capacité de détection individuelle, utile mais insuffisante. Cette « politique de l’attention » permet de développer une co-vigilance collective qui pourra si nécessaire se matérialiser dans une intervention à plusieurs voix, chacun pouvant être porteur d’une partie de l’aide apportée à une personne en souffrance (le manager, le RH, le psychologue, le collègue, le médecin du travail, le représentant du personnel…) dans un travail en commun, coordonné. Il s’agit bien alors de passer de la recherche d’une compétence individuelle au développement d’une culture et d’une pratique collectives.
Nicolas Magnant